Rencontre avec le politologue James C. Scott
James C. Scott est l’une des figures intellectuelles les plus marquantes et les plus stimulantes de notre temps. Ces travaux portent principalement sur les rapports de pouvoir au sein des sociétés paysannes et sur les puissances d’agir des dominés. Devenu spécialiste de l’Asie du Sud-Est depuis son engagement contre la guerre du Vietnam, il a signé une enquête sur une vaste région montagneuse (Zomia) où des fugitifs – environ 100 millions de personnes – se sont réfugiés au cours de l’histoire pour échapper au contrôle des gouvernements des plaines. Une contre-histoire de la modernité que développe son dernier ouvrage, Homo domesticus. Puisant dans ce qu’il appelle l’ « histoire profonde » (4000 à 2000 ans avant J.C.) qui a vu l’émergence de l’agriculture et des premiers centres urbains, Scott balaie l’idée selon laquelle la naissance des États découlerait naturellement de la sédentarisation et constituerait l’étape cruciale de la civilisation humaine. Pour lui, il a fallu en réalité contraindre les populations en s’appuyant sur un outil inattendu : le grain (blé, orge, riz, millet, maïs).
James C. Scott est professeur émérite de science politique et d’anthropologie à l’université Yale (Etats-Unis). Parmi ses publications françaises : La Domination et les arts de la résistance (Amsterdam, 2009), Zomia ou l’art de ne pas être gouverné (Seuil, 2013), Homo domesticus. Une histoire profonde des premiers États (La Découverte, 2019).