Pendant toute la durée du festival, l’anthropologue des images, Maria Fernanda Troya, proposera l’atelier interactif « Expériences du regard »

La méthode est simple. Des séries de photographies en noir et blanc sont disposées sur un fond noir. On choisit une photo et on compose son propre groupe d’images, sa propre série, en gardant les mêmes images ou en essayant d’autres assemblages. Et ainsi de suite…

Cette intervention s’inscrit dans le cadre du travail de recherche sur des images d’archives, que je mène depuis quatre ans. À partir de la découverte d’un groupe de photographies sur la population Kichwa de la région d’Archidona*, j’ai commencé à m’intéresser aux images représentant les populations indigènes d’Équateur qu’ont réalisées des étrangers au début du 20ème siècle.

Cette recherche  inclut une analyse critique de ces images d’archives et de leur utilisation dans le cadre des discours sur l’altérité produits en Occident pendant ces décennies. Un des axes de cette recherche se concentre sur les aspects esthétiques et iconographiques des images récoltées. L’intervention prétend uniquement permettre une mise en scène de l’image d’archive. Il faut garder à l’esprit que les images présentées ne sont rien d’autre que des images d’archives : certaines sont de qualité médiocre (ce qui est assez fréquent pour les archives visuelles) ; à cela s’ajoute le désordre, l’imprécision ou une absence de datation et de localisation précises des photos, ainsi qu’un manque d’informations sur l’identité des personnes photographiées.

En tenant compte de toutes ces limites, je propose d’explorer cette documentation visuelle en m’inspirant du travail de l’historien d’art, Aby Warburg. Entre la fin du 19ème et le début du 20ème, Warburg a étudié les relations entre l’art de la Renaissance et l’art et la pensée de l’Antiquité.

Pour cette intervention, j’emprunte à Warburg un dispositif qu’il a utilisé pour la réalisation de son œuvre Mnémosyne (œuvre inachevée), sorte d’atlas d’images fait de jeux de montages de photographies. Grâce à ce dispositif, Warburg a pu réaliser une comparaison visuelle de motifs se ressemblant. (C’est ce travail qui l’a fait  reconnaître aujourd’hui comme le père de l’iconographie). Les « constellations » – qu’il prenait également en photo – ont permis de révéler que survivaient dans les œuvres de la Renaissance des croyances et des valeurs païennes – ce qui avait été enfoui pendant des années.      Maria Fernanda Troya

*Ces photos sont attribuées à l’anthropologue français Paul Rivet, et se trouvent au Musée du Quai Branly.